53.
La voix de Merunka résonne dans toute la forêt, comme si elle parlait directement
dans ma tête. A genou devant elle, je la vois accompagnée des trois mêmes
silouhettes. J’en reconnais deux il s’agit d’Ewald et de Dorn.
Le hibou blanc est perché sur la branche d’un arbre. Merunka entre dans le
village tandis que j’entends les voix de Dorn et Ewald prononcer ces phrases
familières, avant de lui emboîter le pas.
« Je suis le résultat des risques auxquels j’ai survécus. Et vous ? »
« Je ne sais pas pourquoi je m’emporte comme ça. »
Le hibou blanc s’envole. J’entends un son boisé familier.
Je me réveillai. Encore ce rêve. Je me retrouvai assis sur le sol en plein milieu de la
forêt. Nous avions voyagé toute la journée et une bonne partie de la nuit pour nous
distancer de la ville et du port, avant de chercher un lieu adéquat où nous pourrions
nous reposer sans être attaqués.
Le soleil allait se lever bientôt. Dorn et Ewald dormaient de part et d’autre du
foyer. Nous avions éteint le feu pour ne pas être repéré pendant notre sommeil.
J’avais froid.
Quitte à être réveillé, je me dis que je pouvais aussi bien m’entraîner. Je saisis mon
bâton. Bien que soigné, je sentis en me levant la présence de la cicatrice. Le coup
d’épée de Bartek lors de notre première confrontation. Le soir même où j’avais fait
ce rêve pour la première fois.
Je m’inquiétais pour Merunka et son père. Mon regard s’attarda sur mon baluchon,
duquel dépassait la flûte en bois qu’elle m’avait donnée.
Les circonstances m’avaient éloigné de la ferme, mais il fallait que j’y retourne. Je
l’avais laissée seule, à la merci de Tadeusz et de ses ambitions malsaines. Le jour
allait bientôt se lever. Je me résolus à en parler à Ewald et Dorn dès leur réveil.
Mais alors, j’entendis des bruits de pas.