69.
Elle jaugeait avec curiosité mon bâton de marche, le manipulant comme s’il était le
sien.
Nous étions tous les trois assis dans le salon de cette femme mystérieuse du nom
de Hasel. Sanja, était repartie. Elle nous regarda tour à tour, puis pointa soudain mon
bâton vers moi. « Vous, vous cherchez quelque chose », me dit-elle. « Vous, vous
fuyez quelque chose », annonça-t-elle à Dorn. Elle se tourna vers Ewald. « Vous… »
Elle prit un temps pour fixer Ewald comme si quelque chose avait attiré son
attention, puis ses yeux, s’écarquillèrent comme si elle venait de comprendre
quelque chose. « Ooooh ! Vous, vous avez trouvé quelque chose. » Elle rit.
« Accrochez-vous », lui dit-elle avec un clin d’œil.
Son rire était agréable. Cristallin et boisé, comme l’odeur des forêts du nord après
la pluie. Comme un autre son que j’avais déjà entendu avant.
Ce n’était pas dans mes habitudes d’être aussi déconcentré. J’avais l’impression
d’être transparent sous son regard. Mis à nu devant elle. Et elle le vit. Sans mot, ni
égard, elle fouilla mon sac pour en sortir la flûte. « Ouh, j’espère que vous me
jouerez un petit air quand nous serons seuls, me dit-elle enthousiaste.
D’où venait cette impression qu’elle avait déjà prévu tout ce qui allait arriver dans
sa maison ?